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Des panneaux solaires dans l’espace pour alimenter la Terre en électricité

L’Agence spatiale européenne (ESA) mise sur une idée audacieuse : capter les rayons du Soleil directement depuis l’espace pour les transformer en électricité. Cette semaine, l’agence a rassemblé des experts en énergie et des acteurs du spatial pour avancer sur ce projet visionnaire.

Dans l’espace, la lumière du Soleil brille sans interruption et sans être filtrée par l’atmosphère terrestre. Cette caractéristique offre une opportunité unique de générer une énergie renouvelable continue et potentiellement inépuisable. Si ce projet aboutit, il pourrait révolutionner la transition énergétique et réduire notre dépendance aux énergies fossiles.

L’électricité captée depuis l’espace serait acheminée vers la Terre grâce à des technologies de transmission sans fil, encore en cours de développement. Toutefois, la quantité d’énergie produite reste limitée à ce jour, ce qui pose des défis technologiques et économiques.

Bien que ce projet semble tout droit sorti d’un film de science-fiction, son origine remonte aux années 1940. Depuis, l’idée a traversé les décennies, inspirant chercheurs et ingénieurs à explorer des solutions pour concrétiser ce rêve énergétique.

Avec ce projet, l’ESA se positionne à la croisée de l’innovation technologique et des enjeux environnementaux, ouvrant peut-être la voie à une nouvelle ère énergétique. Reste à voir si ce pari sera réalisable dans les années à venir.

Un concept de science-fiction pour alimenter la Terre

L’auteur de science-fiction Isaac Asimov en avait déjà rêvé dans les années 40.

Des géants comme Boeing, Mitsubishi et la NASA se sont investis corps et âme dans ce projet prometteur. L’idée : capter l’énergie solaire depuis l’espace et la transformer en électricité utilisable sur Terre, offrant ainsi une solution potentielle pour réduire significativement les émissions de gaz à effet de serre et lutter contre le changement climatique. Avec la montée en puissance des énergies renouvelables, ce concept connaît un regain d’intérêt.

Il permettrait de lutter activement contre le dérèglement climatique, le concept a le vent en poupe ces dernières années. Les dispositifs spatiaux réduiraient de façon considérable les émissions de gaz.

Ce projet fou bénéficie aujourd’hui de toutes les conditions nécessaires pour voir le jour.

Aujourd’hui, les avancées technologiques et économiques offrent un contexte favorable à la réalisation de ce rêve. Sanjay Vijendran, docteur en physique et responsable du programme Solaris, un projet de l’Agence spatiale européenne dédié à l’étude de la faisabilité de ces centrales solaires, confirme dans une interview au Figaro : « La conversion du rayonnement solaire en électricité, puis en signaux de radiofréquence transmis à la Terre, est une technologie déjà opérationnelle, utilisée quotidiennement par les satellites de télécommunication équipés de panneaux solaires. »

Côté financement, les étoiles semblent également alignées. En dix ans, le coût d’accès à l’espace a chuté de 50 %, notamment grâce aux fusées réutilisables comme la Falcon 9 de SpaceX, rendant cette ambition plus accessible que jamais. Un projet qui, de la science-fiction à la réalité, pourrait bientôt transformer notre manière de produire de l’énergie.

Exploiter la puissance énergétique du soleil

Séduite par le projet, la Royal Aeronautical Society a organisé la semaine passée à Londres une conférence internationale portant sur le déploiement de l’énergie solaire spatiale. Étalée sur trois jours et co-présidée par le ministère de l’Énergie et les agences spatiales européenne (ESA) et britannique (UKsa), elle avait pour but de passer en revue toutes les options technologiques disponibles pour mener à bien ce projet.

Les spécialistes de l’énergie étaient eux aussi conviés. “Il faut réunir les gens du spatial et de l’énergie car in fine, ce sera un projet énergétique, basé sur des technologies spatiales” souligne Sanjay Vijendran.

Un certain nombre de maquettes et de démonstrations a en effet prouvé la faisabilité du projet, donnant plus de crédit à cette idée insolite.

En juin 2023, l’institut technologique de Californie (Caltech), et le Space Solar Power Demonstrator (SSPD) ont initié le dernier projet en date.

Un satellite de 50 kg, permettant de mener à bien ces études, a été lancé en janvier 2023 : comportant des dispositifs pour la captation d’énergie, il est parvenu à transformer la puissance solaire en électricité et à la transporter jusqu’à la terre sous la forme d’un faisceau micro-ondes, réceptionné par une antenne terrestre.

Néanmoins, la quantité d’énergie recueillie par l’engin est relativement faible : 200 milliwatts.

Pas de quoi éclairer la terre entière, mais les données sont prometteuses.

Sanjay Vijendran signale ainsi “Tout l’enjeu est désormais de changer d’échelle avec un démonstrateur de grande taille.” Le responsable du programme Solaris a présenté le bilan des études de viabilité à deux délégations.

La première étude, menée par la branche italienne de Thales Alenia Space, a porté sur la création d’un parc de 55 satellites-centrales solaires, en orbite géostationnaire (GEO, située à 36000 km de la Terre.)

Le dispositif présenterait des panneaux solaires et des équipements de transformation de l’énergie en signaux de radiofréquences, qui seraient transférés à des stations d’accueil européennes, près des zones d’habitation denses.

Sanjay Vijendran estime que les centrales solaires “généreraient de grandes quantités d’énergie 24 heures sur 24, équivalente à celle des centrales nucléaires terrestres.”

L’Agence spatiale européenne a quant à elle évalué que chaque centrale spatiale d’une puissance d’1 Gw engagerait “quelque 12 milliards d’euros, ce qui est similaire au prix d’un réacteur nucléaire terrestre de même capacité.” Le projet semble donc faisable.

TAS France poursuit une piste aux dimensions internationales

TAS France poursuit une autre piste, qui prendrait des dimensions internationales : il s’agirait de refléter puis de renvoyer les rayons du soleil vers des panneaux solaires, pour permettre une hausse de 60% des capacités photovoltaïques.

Ce concept a déjà été exploré par Roskomos dans les années 90. L’agence russe avait développé un miroir géant depuis sa station MIR pour apporter de la lumière en Sibérie en 1993.

Les ambitions d’Arthur D. Little vont par-delà la toundra : 4000 miroirs géants, d’un diamètre d’1km seraient déployés en orbite basse, à environ 890 km de la Terre. Le spécialiste de l’Agence spatiale européenne explique ainsi “Construire ces miroirs est assez simple.

C’est un peu comme un trampoline.

Il y a une structure légère dans laquelle le miroir, composé d’une très fine membrane réfléchissante, en aluminium spécial, est replié. Pour l’assembler et le déplier, nous utiliserions des robots en orbite.”

Or cette option pourrait bénéficier à tous les pays du globe et notamment à ceux qui sont particulièrement exposés aux rayons solaires : “Cette solution est très intéressante pour les pays bénéficiant d’un ensoleillement quasi permanent en Afrique, au Moyen-Orient et en Inde qui investissent dans de grandes fermes photovoltaïques.”

Du côté financier, le bilan du cabinet de conseil chiffre chacun de ces méga-miroirs à 4 millions, hors lancement, manufacture et maintenance. Cette option serait pérenne d’un point de vue économique avec moins de 1000 miroirs. Elle proposerait également de l’électricité à des prix compétitifs. Depuis 2022, l’Agence spatiale européenne a 60 millions d’euros à sa disposition pour financer des premiers travaux.

Cette enveloppe arrivant à échéance à l’horizon 2025, l’Esa compte sur l’obtention d’un budget plus important lors de la réunion de 2025 des 22 ministres de l’Espace.

Or, le projet ne fait pas l’unanimité, comme le suggère Sanjay Vijendran : “Pour le moment, seul le Royaume-Uni soutient le projet et l’a financé. L’Allemagne, la France et l’Italie, les trois plus importants contributeurs aux programmes de l’Esa, n’y participent pas encore. Nous avons un travail de conviction à mener.”

La conquête spatiale semble pour l’instant balbutiante alors que la France s’engage de plus en plus dans le déploiement des énergies renouvelables. 

De nombreux projets de transition énergétique en attente

L’Agence spatiale européenne juge aujourd’hui que les deux projets constituent des pistes viables et réalistes. Elle souligne néanmoins que la première option, fondée sur les radiofréquences, demanderait plus de temps pour être déployée à grande échelle.

Les miroirs présentent une technologie plus simple et plus facilement développable.

Combiner les deux dispositifs reste envisageable pour l’Esa, qui espère néanmoins l’approbation en 2026 du lancement d’un projet pilote à petite échelle des méga-miroirs pour 2030.

L’idée serait ensuite de développer un prototype plus important d’ici quelques années, si le projet pilote réussi, pour initier le lancement et l’installation d’un parc de miroirs sur dix ans. À l’horizon 2040, date butoir pour de nombreux projets de transition énergétique.

Les montants engagés dans un tel programme sont difficilement supportables par l’Agence spatiale.

Elle souhaite obtenir le soutien de l’Union européenne, des industriels et des investisseurs privés.

Le directeur de Solaris explique ainsi “Il s’agit de se doter d’une nouvelle infrastructure, qui pourrait être similaire à Galileo, le GPS européen, à Copernicus, dans l’observation de la Terre et à Iris2 dans l’internet spatial, que l’UE a financés.”

Dans un contexte d’accélération des autres pays, comme les États-Unis, le Japon et la Chine, l’Agence enjoint l’Europe d’agir.

L’US Air Force a déjà prévu d’envoyer en orbite un prototype plus imposant que celui de Caltech, tandis que la Chine et le Japon ont prévu des tests en 2028 et 2025. L’Arabie Saoudite, le Royaume-Uni et les Émirats arabes unis sont aussi sur le coup. Sanjay Vijendran révèle des chiffres exorbitants “Quelque 500 millions ont été investis par les agences spatiales dans le monde des projets d’énergie solaire spatiale.”

Or, la durabilité de dispositifs en orbite est incertaine : l’affluence spatiale est déjà importante, avec des milliers de satellites internet comme Starlink, et le risque de collision des monuments est considérable. Un autre frein au développement d’un dispositif durable, dans un contexte où la Commission européenne met pourtant l’accent sur la transition énergétique.

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